La classification madame/mademoiselle est d'autant plus difficile à appréhender qu'elle porte sur plusieurs paramètres : la situation maritale bien sûr, la situation "parentale" (une femme avec enfant est appelée Madame, même si elle n'est pas mariée), l'âge supposé ou, plus exactement - et surtout plus cruellement : le niveau esthétique. Une jolie femme recevra du "mademoiselle" jusqu'à un âge avancé, tandis qu'une grosse avec du poil au menton sera appelée "madame" dès sa prime adolescence. Mais oui, c'est révoltant. C'est aussi terriblement ambigü. Si les femmes acceptent encore d'être appelées mademoiselle, c'est bien parce qu'elles sont sensibles au compliment que peut véhiculer, sous certaines conditions, l'emploi de "mademoiselle". Il ne faut pourtant pas se leurrer : les plus belles et les plus coquettes finissent tôt ou tard par systématiquement recevoir de ce "madame" prétendument respectueux, qui les renvoie dans la catégorie des chairs plus très fraîches... On ne fait pas remarquer aux hommes qu'ils sont beaux ou laids ou qu'ils ont pris de l'âge ; alors, pourquoi s'obstiner à le faire remarquer aux femmes ?
Adopter mademoidame, c'est revendiquer le droit d'être jeune, et aussi le droit de vieillir ; le droit d'être belle, et aussi le droit d'être moche. Et, par-dessus tout, le droit de ne pas se l'entendre dire.
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