dimanche 1 juin 2014

Mamie dans le métro

Au hasard de la toile, je suis tombée sur une interview de Corinne Touzet, comédienne, qui déclare : "C'est viscéral chez une femme d'avoir envie de donner un enfant à l'homme qu'elle aime."  C'est sans doute vrai pour elle si elle le dit, mais faut-il pour autant en faire une généralité ? L'équation amour = faire un enfant ne résulte-t-elle pas surtout d'une injonction normative répétée comme un mantra ? Ce que nous prenons pour des vérités indiscutables est susceptible d'évoluer au cours du temps. Ainsi, le désir sexuel des femmes supposé moindre que celui des hommes est une construction historique de deux siècles à peine.
Pour en revenir à la déclaration de mademoidame Touzet, notez que le désir viscéral d'enfant est prêté à la femme, pas à l'homme. "La" femme est toujours ramenée à ses organes, à sa fonction reproductrice. Dans ce contexte, la ménopause est vécue comme un drame absolu. Notre société déteste les vieux. On les laisse debout dans les transports en commun avant de les entasser dans des mouroirs en répétant qu'ils ne servent à rien - alors que la gériatrie est un secteur en plein essor. Les jeunes mamans qui laissent leurs enfants s'étaler sur les banquettes du métro devant une octogénaire qui tient à peine sur ses jambes pourraient quand même se dire qu'elles aussi, peut-être, un jour, seront vieilles et fatiguées, non ? Finalement, c'est souvent moi qui laisse ma place aux vieilles dames. Quand c'est une femme enceinte en revanche, plusieurs personnes se disputent l'honneur de lui céder un strapontin. Chaque rame de métro sans chauffeur transporte donc des centaines de gens sans emplois, des vieux qu'on laisse debout, des enfants promis à un chômage certain, des mendiants, mais la priorité serait de faire toujours plus de bébés, c'est-à-dire au moins un à chaque histoire d'amour ?  Y aurait pas par hasard quelque chose qui cloche, dans cette société ?

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