jeudi 30 juin 2011

Evolutions

Nous avons adopté l'euro, nous nous sommes massivemment arrêtés de fumer, même les plus réfractaires à la technologie se sont mis à Internet... Le changement semble terrible à première vue ; une fois le pas franchi, on se rend compte que ce n'était pas si difficile. Il n'y a pas d'habitude qui ne puisse être modifiée.
Pour quelles raisons voudrait-on donc conserver ces termes de madame et de mademoiselle, qui ravalent la femme à un rôle secondaire ? Qui autorisent un contrôle social de sa vie personnelle ? Quand on me demande "Madame ou mademoiselle ?", j'ai toujours l'impression qu'on veut regarder dans ma culotte. Mais ça ne vous regarde pas enfin ! Laissez-moi tranquille et appelez-moi Mademoidame !

samedi 25 juin 2011

Français(es), encore un effort !

Il y a seulement cinquante ans, la terreur de tout parent était que sa fille devienne ce qu'on appelait alors une "fille-mère". Un enfant né hors mariage - on parlait d'enfant "naturel - était vécu dans les familles comme une véritable honte.
Aujourd'hui, les demoiselles ne sont plus que très rarement de "vraies" jeunes filles, et le mariage ne sert plus guère qu'à recevoir des cadeaux ou à faciliter la situation d'un compagnon étranger. Quand 55% des enfants d'un pays naissent hors mariages (chiffres INSEE pour 2010), les termes madame et mademoiselle n'ont vraiment plus aucun sens - hormis celui de faire perdurer les discriminations dont les femmes sont victimes.
Pourquoi s'obstinerait-on à conserver un système de civilités qui ne correspond plus à la réalité ?
Pourquoi, alors qu'on ne cesse de parler d'égalité professionnelle et de parité, refuserait-on de faire évoluer le langage ? C'est une question de bon sens et d'équité. Alors prononcez le mot à voix haute, mademoidame. Gardez-le un peu en bouche comme vous le feriez d'un bon vin. N'est-ce pas qu'il est délicieux, passée la première surprise ?

vendredi 24 juin 2011

Dialogue de demoidames dans le métro

- Mademoidame, votre sac est ouvert.
- Vous m'avez appelée comment ?!
- Mademoidame.
- Mademoidame ?
- Mademoidame. Ben quoi, on ne fait pas de différence entre les hommes jeunes et les hommes vieux, entre les hommes mariés et ceux qui ne le sont pas ; on leur dit Monsieur à tous. Et bien pour les femmes, maintenant, c'est pareil : on leur dit Mademoidame.
- Mais c'est super ! Pourquoi j'en ai pas entendu parler avant ?
- C'est encore un peu d'avant-garde, ça se répand petit à petit. Bon, j'arrive à ma station, il faut que je descende. Je vous dis au revoir, Mademoidame.
- Au revoir Mademoidame !

dimanche 19 juin 2011

Madame ou Mademoidame ?

Je me demandais, depuis tant d'années, pourquoi les féministes françaises ne s'attaquaient pas à cette question du madame/mademoiselle...
Dès le début de Mademoidame, j'ai donc cherché à contacter les associations et les blogs féministes que je trouvais au hasard d'Internet. Et là, stupeur, j'ai découvert que le troisième terme n'avait pas l'heur de plaire à toutes. Les féministes semblent en majorité pro madame. Elles préconisent l'usage de madame pour toutes les femmes, y compris les petites filles. Sur une des pages web que j'ai fréquentées, le commentaire que j'avais laissé pour faire connaître mademoidame a été carrément supprimé !
Les seules à m'avoir répondu, merci à elles, sont les militantes d'Osez le féminisme. Elles entamaient au mois de mars une réflexion sur madame/mademoiselle. Un peu plus tard, elles m'ont invitée à une réunion, mais elles avaient déjà commencé à travailler sur une campagne pro madame, il n'y avait pas de place pour mademoidame.
Il y aurait pourtant un débat intéressant à avoir sur les avantages comparés de madame et de mademoidame.
C'est vrai, mademoidame semble étrange au début, mais madame n'est jamais que le pendant de mademoiselle.
Madame et mademoiselle instillent l'idée qu'une femme n'existe pas socialement par elle-même. Elle est soit en attente d'un mari (mademoiselle), soit déjà mariée (madame), comme si le destin d'une femme ne pouvait dépendre que d'un homme. On dit d'ailleurs d'une femme mariée (une madame) qu'elle est "casée" - quel vilain mot.
En fait, Madame et Mademoidame ont des usages différents. Madame, ça va bien sur un courrier des impôts. Dans la rue, Mademoidame est plus élégant : il évite aux très jeunes femmes de se sentir enfermées trop tôt dans le carcan du madame, aux moins jeunes de s'entendre remarquer qu'elles ont pris des rides - et à tous les autres de commettre des gaffes.

lundi 13 juin 2011

Ciel, mes maris !

Rares sont celles qui trouvent l'âme soeur du premier coup. Nous avons presque toutes eu, nous aurons presque toutes plusieurs compagnons au cours de notre vie. Quand ça ne va plus, enfants ou pas, on se sépare. Un couple marié sur deux finit par divorcer, deux sur trois en Ile-de-France. L'amour ne se garantit pas et le mariage de ce point de vue ne sert à rien. Voilà pourquoi, sans doute, 55% des enfants nés en France en 2010 sont nés de parents non mariés.
Ce mouvement irréversible est amorcé depuis quarante ans. Il a profondément transformé la société française. Les appellations réservées aux femmes par tradition, Madame et Mademoiselle, font référence à une société qui n'existe plus que minoritairement. Elles sont obsolètes et discriminantes. Il faut les faire évoluer. Mademoidame s'y emploie.

mercredi 8 juin 2011

Portrait d'une pionnière

Poétesse et slameuse, Camille Case est une Mademoidame de la première heure. Elle nous explique pourquoi.




Qu'est-ce qui t'a plu dans mademoidame ?



Lire Proust m'a appris qu'il se raconte bien souvent autre chose que ce qui est dit en apparence. Au cœur des mille usages qui peuvent être fait d'un mot, on a toutes vécu cette situation où un homme vous appelle "Mademoiselle" avec un petit air entendu, que vous pouvez traduire ainsi : « Je te regarde, et démerde-toi avec mes désirs." On a toutes éprouvé aussi le "Madame" qui vous fige au contraire dans une espèce de respectabilité prématurément cireuse, qui vous tiendrait à distance des joies de la vie ( si vous vous laissiez faire )... Pas besoin d'avoir lu toute la Recherche du temps perdu pour être sensible à cette dimension cachée des mots. Les mots, c'est tout un rapport au monde, à l'autre, qui est mis en circulation à travers l' usage qui en est fait, que l'on s'en rende compte ou non d'ailleurs. Des mots disparaissent et avec eux la réalité qu'ils nommaient ; des mots naissent aussi... parce qu' ils sont attendus, désirés. L'arrivée de mademoidame dans la langue française ouvre de belles perspectives relationnelles, puisque que nous sommes tous liés par les mots. Mot-valise ( deux en un), il se pose d'entrée avec humour et poésie, et il vient résonner en vous, dans tous vos recoins si vous êtes bien attentif. Mademoidame vous accorde d'être là où vous êtes, il n'exclut même pas le meilleur de la galanterie, c'est-à-dire la délicatesse d'attention. Le mot ne s'adresse qu'à vous, ne vous demande pas par-derrière si vous êtes mariée, veuve ou célibataire ; il vous laisse libre d'entrer comme bon vous semble dans l'échange. Il est sans jugement, il vous met en confiance, vous étonne, vous fait sourire, bref... il fait du bien ! On se sent femme en mademoidame !





As-tu déjà employé mademoidame, et dans quelles circonstances ?



Oui, je l'emploie souvent et consciencieusement dans les ateliers d'écriture que j'anime, puisque que les mots sont mes outils de travail. J'appelle Mesdemoidames toutes les jeunes filles et les femmes avec qui je travaille - à réveiller la créativité via justement cette conscience des mots, qui se mettent à exister enfin d'une manière agissante. Elles n'ont pas besoin d'avoir été longtemps à l'école ou de maitriser parfaitement le français pour y être sensibles - et pour aimer qu'on les appelle ainsi !








Quelles ont été les réactions de tes interlocuteurs/interlocutrices ?



Les femmes sourient, se redressent ; les hommes s'étonnent et s'en saisissent. On m'appelle "Mademoidame" bien souvent désormais... Ce mot vous accepte tout entière, je l'éprouve et l'observe chez d'autres. Il faut juste un peu d'audace et d'humour pour en faire usage, à croire que ce mot incarne précisément ce qui nous manque ... D'où la nécessité de le faire entrer d'urgence dans son vocabulaire. On ne risque rien à déclarer "Mademoidame" en réponse au moindre "Madame ou mademoiselle? ", à l'utiliser avec sa banquière, sa boulangère ou avec une inconnue à qui on demande l'heure dans la rue - sauf d'allumer une lueur nouvelle dans un regard. On ne risque rien d’autre que de faire et se faire du bien."



Camille Case est sur facebook http://www.facebook.com/media/set/?set=pa.1534684264#!/profile.php?id=1534684264&sk=wall




jeudi 2 juin 2011

Le spectre de la vieille fille

S'entendre dire "mademoiselle" dans un magasin parce qu'à plus de quarante ans, on a une allure de sylphide, passe encore. Il faudrait être particulièrement bégueule pour ne pas reconnaître le compliment. Mais recevoir des enveloppes libellées "Melle", avec des lettres commençant par "Chère Mademoiselle" alors que votre carnet de chèques est depuis longtemps établi à "Madame", voilà qui dépasse l'entendement. De quoi se mêlent-ils, ces gens de l'agence immobilière ? Il leur a semblé que vous viviez seule, mais que savent-ils de vous, et au nom de quoi s'arrogent-ils le droit de vous affubler d'une civilité ridicule qui n'est même pas celle sous laquelle vous leur versez de l'argent ?
Passé vingt-cinq ans, "mademoiselle" est plus que douteux. Le spectre de la vieille fille hante notre imaginaire collectif. Avec son nez crochu, ses mitaines noires, sa verrue sur la lèvre et sa méchanceté proverbiale, la vieille fille incarne la sorcière, le repoussoir absolu. C'est à cela qu'on vous renvoie quand on s'obstine à vous appeler "mademoiselle" alors que vous ne l'avez pas demandé. Comme si aujourd'hui encore, en dépit des statistiques, il était louche de ne pas être mariée ou nantie d'au moins un enfant. Assez de ces images d'Epinal ! Puisque l'agence immobilière ne parvient pas à vous appeler Madame en dépit de votre chéquier, appelons-nous toutes Mademoidame.